Mes tribunes dans le Malakoff Infos

Depuis les élections municipales de mars 2020, je fais partie de la majorité municipale à Malakoff, auprès de la maire, Jacqueline Belhomme. Je fais partie du groupe politique “Les Écologistes” avec six autres élu·e·s. Je porte la délégation “Numérique et Citoyenneté”, pour laquelle j'ai rédigé une feuille de route que vous pouvez consulter ci-dessous.

Ce 21 janvier, nombre de Malakoffiot·tes ont défilé à Paris, répondant à l’Appel des 201, pour demander la non promulgation de la loi Asile-Immigration, qui « s’attaque au droit du sol et aux droits fondamentaux proclamés par la Constitution » (L’Humanité, 7 janvier 2024).

C’est dès le lendemain de la publication de cet appel que les différents partis de gauche et écologistes locaux se sont réunis pour décider d’un appel commun à rejoindre la manifestation, avec aussi les antennes locales des syndicats. La mobilisation a rassemblé au-delà de la majorité municipale, avec les partis Ensemble !, la France Insoumise, mais aussi les syndicats CGT, CFDT et FSU, ainsi que de nombreux citoyens et citoyennes.

Au même moment était annoncé le nouveau gouvernement de l’ère Macron, mené cette fois par notre voisin Vanvéen Gabriel Attal. Une équipe qui ne cache plus du tout sa droitisation de plus en plus décomplexée, dans l’objectif évident de chasser sur les terres électorales du Rassemblement National, ce qui revient à légitimer ses obsessions identitaires et son idéologie raciste. Rappelons que Marine Le Pen saluait, lors du vote de cette loi Immigration, la « victoire culturelle » que cela représentait pour son parti.

Les temps politiques qui arrivent seront bien difficiles… Est-ce que notre initiative locale, rassembleuse, s’inscrit dans un mouvement plus global de prise de conscience ? En tout cas, à Malakoff comme ailleurs, la « classe écologique » décrite par le philosophe Bruno Latour, en est déjà parfaitement consciente, et s’y prépare.

« Un certain socialisme, mondialiste, écologique, pacifiste et humaniste devient crédible. La transformation de la société est non seulement nécessaire, mais indispensable et réalisable. » René Dumont, Nouveaux voyages dans les campagnes françaises, 1977

Le Malaqueen n’est plu. Pendant deux ans, ce « centre social autogéré » avait investi un bâtiment de bureaux vides de la ville. C’était un lieu de vie organisé sans l’autorisation du propriétaire, une société immobilière spécialisée dans l’achat et la location d’immeubles de bureaux vacants.

Nous avons visité le Malaqueen, rencontré ses animateurs·trices, suivi la concrétisation de leur double ambition. C'était d’abord un refuge pour personnes aux parcours compliqués : migrants espérant une vie digne, personnes trans en rupture avec leurs familles, partisans d’un modèle de société bâti sur le partage et l’autogestion, hors des hiérarchies et des normes… une certaine gauche utopique toujours bien vivante.

C’était aussi un lieu d’expression artistique, des ateliers ouverts aux habitant·es : développement photo, cours de poterie, couture et rapiéçage de vêtements, réparations de vélos et d’ordinateurs, bibliothèque ouverte, salle pour concerts et théâtre… Tout un écosystème culturel et social en train de prendre corps. La loi Kasbarian-Bergé rendra désormais encore plus difficile ce genre d'initiative, en créant une criminalisation de la précarité de fait, y compris pour les locataires en difficulté financière, encore plus menacés désormais de mal-logement et de sans-abrisme. Rien qu'en Ile-de-France, il manque plus de 780 000 logements sociaux.

Reste que cette revendication d’un “droit à la ville”, que portaient “les Malaqueen”, nous aura marqué comme un défi stimulant et vivifiant, une séquence qui a testé les limites de notre fonction d’élu·es et raffermit notre engagement politique.

- Un policier lors de l’expulsion : “Qui est votre chef ?”
- Une résidente du Malaqueen : “C’est Petit Bonhomme, le chat du Malaqueen ! Désolé mais il n’est plus là, il est à la campagne désormais.”

En cohérence avec la feuille de route de la délégation Numérique et Citoyenneté, les services de la mairie de Malakoff ont basculé à la mi-novembre vers un nouvel écosystème informatique pour la gestion des documents, des courriers électroniques et des agendas. C’est plus de 800 boîtes e-mail et postes de travail qui ont été migrés depuis la solution Outlook de Microsoft vers des outils libres et open source.

Microsoft est un des fameux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), des entreprises de droit privé américain, des géants du net dont une partie au moins du business consiste à capter autant que possible les « données personnelles » - c’est-à-dire les informations intimes - de leurs usagers. Le prestataire retenu par l’équipe de la Direction des Services d’Information propose une solution complète, composée des logiciels BlueMind pour la messagerie électronique et les agendas, NextCloud pour le partage de fichiers, OnlyOffice pour l’édition de fichiers, BigBlueButton pour les visios et le télétravail. Tous ces logiciels sont donc « open source », c’est-à-dire que leur code est librement copiable et modifiable, leurs licences d’exploitation font qu’ils sont utilisables par tout le monde sans avoir à payer de droits de propriété.

Ainsi, pour exploiter ces logiciels, la mairie paie un « droit d’usage » et non pas un « droit de propriété », et l’investissement est significativement moindre que les licences équivalentes à verser au géant Microsoft. C’est ce qu’on appelle la souveraineté numérique, et nous sommes convaincus qu’elle permet de garantir un strict respect des données personnelles qui transitent via les ordinateurs de votre mairie.

« Nous étions loin de nous douter que cela aboutirait à une si grande infrastructure publique… », Vinton Cerf, à propos des premiers développements d’Internet en 1992.

Faut-il se féliciter de l'arrivée d'un “dark store” à Malakoff ? Dans ce nouveau type de commerce, on commande ses courses depuis son smartphone, sans sortir de chez soi, puis un livreur s'en va remplir le panier dans le lieu de stockage des denrées, totalement fermé aux passants (d'où la dénomination “magasin sombre”), pour le livrer à l'adresse indiquée, à vélo ou à scooter.

Et pour contrer l'objection du risque d'ubérisation, plusieurs chaînes de magasins sont arrivées en France, ces dernières années, avec la promesse de vrais CDI à leurs jeunes livreurs. Mais hélas pour ce “modèle” économique, le Code du Travail est encore protecteur des droits des salarié·es et exigeant quant aux devoirs des employeurs.

Ces derniers mois, un peu partout en France, ces entreprises mettent fin aux périodes d'essai et les syndicats s'inquiètent de voir arriver la solution-miracle de la start-up nation macroniste : proposer à ces jeunes de passer à l'auto-entreprenariat pour espérer engranger les maigres revenus de chaque course. Et cette fois, sans protection sociale.

Et pour quel bénéfice pour la vie de la cité ? Quel avantage à développer des commerces où l'on ne va pas, supprimant ainsi tout échange, toute opportunité de convivialité ? Ces dark stores transforment un peu plus les citoyen·ne·s en consommatrices et consommateurs, éloigné·es les un·es des autres mais aussi des rues et de celles et ceux qui irriguent le tissu économique de la ville : ses commerçant·es ! Un progrès, vraiment ? Pour qui ?

Les Ecologistes Malakoff s'inquiètent de cette mode. Au sein de la commission Commerces et en bonne entente avec nos partenaires de la majorité, nous veillerons à nous faire entendre.

“Il nous incombe précisément de distinguer les promesses de la technologie – son potentiel créateur – de sa capacité de destruction.” Murray Bookchin

La ville de Malakoff s’engage dans un numérique responsable et inclusif, afin d’améliorer l’expression citoyenne de ses habitant·e.s, et notamment des plus jeunes. Le partenariat avec l’UNICEF, voté lors du conseil municipal du 13 octobre, qui fait de Malakoff une « ville amie des enfants », est l’occasion de développer de nouvelles initiatives.

À côté du Conseil Éducatif Local (CEL) et du Conseil Local de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD), le Comité de pilotage municipal de l’inclusion numérique réunit les services de la mairie et les acteurs du médico-social, pour accompagner les parents et les jeunes dans leurs activités et démarches en ligne. Dans le cadre de la prévention des conduites à risque, des actions de sensibilisation aux usages sont proposées dans le nouvel Espace Publique Numérique (EPN) de l’Espace de vie sociale du quartier Valette (ancienne maison de quartier), qui a ouvert ses portes en octobre. En parallèle, la Direction de la Citoyenneté développe encore un peu plus la plate-forme de démocratie participative de Malakoff, ouverte en septembre 2020 (nous.malakoff.fr), afin d’inciter les jeunes à s’emparer des problématiques locales.

Toutes ces initiatives et actions, portées par les équipes des services de la ville, sont triplement motivées. D’abord par l’impérieuse nécessité de lutter contre la fracture numérique, qui empêche des familles entières d’accéder à leurs droits. Ensuite, par le souci d’encourager la démocratie locale, via des technologies toujours en évolution. Enfin, par la volonté de s’appuyer, partout où c’est possible, sur des solutions libres et opensource qui font travailler des prestataires techniques en France, plutôt que de faire appel aux applications des géants du web, si gourmands des données personnelles de leurs captifs usagers.

Ce 8 mars, Malakoff célèbre la Journée Internationale pour les Droits des Femmes. L'ouverture prochaine de la Maison des Femmes dans notre commune en est la traduction concrète. Cette Journée est officialisée par l'ONU en 1977, mais c'est bien plus tôt que l'idée est lancée…

Dans les années 1910, Clara Zetkin, enseignante et journaliste allemande, membre de la Ligue Spartakiste aux côtés de Rosa Luxembourg, farouchement pacifiste et résolument féministe, propose une “journée internationale des femmes” afin de porter trois revendications : le droit de vote, le droit à travailler et la fin des discriminations faites aux femmes. A cette époque, ces revendications sont… révolutionnaires.

La Journée du 25 Novembre “pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes”, date, elle, de 1999. Elle trouve son origine en 1960, avec l'assassinat des trois sœurs Mirabal en République Dominicaine: María Teresa, Minerva et Patria sont lâchement exécutées par les hommes du dictateur Trujillo, parce qu'elles militaient pour la liberté et la démocratie.

Dans son autobiographie en 1934, l'anarchiste russe Emma Goldman, sœur de lutte de Clara Zetkin, raconte une anecdote devenue célèbre. Lors d'une soirée festive, un camarade de lutte la réprimande : elle ne devrait pas danser, pas de cette façon, avec “un tel abandon et tant d'impudeur”, car, ce faisant, elle nuirait à “la Cause”. Emma Goldman rétorque à son camarade que s'engager pour changer ce monde d'injustices, c'est aussi casser le lourd carcan des conventions bourgeoises, et qu'il ne s'agit certainement pas de devenir bonne sœur ni de transformer la lutte pour l'émancipation des peuples en un triste monastère.

C'est cette anecdote qui est aujourd'hui résumée par cette citation désormais bien connue, même si apocryphe : “Si je ne peux pas y danser, je n'ai que faire de votre révolution !”.

Le 23 novembre, Place de la République à Paris, la police déloge une centaine de migrant-e-s, qui ont fui leurs pays ravagés par les guerres et la crise climatique. Scènes surréalistes de fonctionnaires-Robocop, qui chassent les plus pauvres d’entre les plus pauvres, distribuent coups de matraque et croche-pieds, ainsi qu’aux journalistes présents. Contraste saisissant avec la mise en scène d’Emmanuel Macron en 2017, photographié la nuit dans une rue de la capitale, un genou à terre, devant la tente d’un SDF …

Cette même semaine, la loi Sécurité Globale est votée à l’Assemblée Nationale, son article 24 crée un délit « d’intention de nuire » aux policiers. La manœuvre est claire : décourager celles et ceux qui voudraient continuer à documenter cette inadmissible violence d’État. Avertissement du Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme de l’ONU, alertes des médias, images révoltantes de la soirée, rien n’y fait… La Macronie masque de plus en plus mal ce virilisme d’hommes des cavernes qui lui tient lieu de doctrine politique.

À Malakoff, les associations et la municipalité font leur part pour accompagner des familles réfugiées, victimes de la politique répressive impulsée par le Ministère de l’Intérieur. Malgré les restrictions budgétaires et la crise sanitaire, notre ville se mobilise pour leur assurer un accueil digne et humain. Parce qu’ici comme dans d’autres villes de la région parisienne, nous n’avons pas oublié la devise républicaine.

Souhaitons à toutes et tous une meilleure année 2021, en espérant que la crise mondiale actuelle, à la fois climatique, sanitaire et sociale – c’est-à-dire écologique au sens fort du terme – sera enfin traitée comme il se doit, dans une démocratie assainie, avec une presse libérée de toute contrainte.

« Si nous ne réalisons pas l’impossible, alors nous devrons faire face à l’impensable. » Murray Bookchin

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  • de Grégory Gutierez